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Le plus grand échec, c'est la réussite. Revue Hypnose et Thérapies brèves 73.




Le plus grand échec, c'est la réussite. Revue Hypnose et Thérapies brèves 73.
Voilà, c’est dit, ou plutôt écrit et même lu. Comment je le sais ? Simple : si vous ne l’aviez pas encore lu, vous ne vous seriez pas posé cette question. Encore moins si je ne l’avais pas écrit. Etonnant, non ? N’empêche qu’après une affirmation si péremptoire il ne reste plus grand-chose à rajouter. Transposé en verbes, cela donne : échouer c’est réussir, ce qui paraît absurde. N’importe quel dictionnaire nous avertit que réussir est l’antonymie d’échouer et vice versa, avec ou sans vice.

Non, le vice en tant qu’antonymie de vertu n’a rien à faire ici. C’est le vice de la langue de proposer plusieurs significations pour un même mot. Nous devons donc considérer le vice du vice versa comme analogue au vice du roi. Le vice du roi ? Quel roi ? Peu importe. Même un roi anonyme ou virtuel fait l’affaire car ce qui nous intéresse n’est pas le roi mais le vice-roi, dont la Wortzusammensetzung en allemand, car je ne sais pas comment la traduire en français : composition parolière ? Non, assemblage verbal, pas très Académie française... bref, la/le lectrice/teur le fera mieux que moi. Pourquoi, « la/le lectrice/teur » plutôt que « le/la lecteur/trice » ? Et pourquoi pas ? Donc la Wortzusammensetzung nous dit que le vice du vice versa a ici la signification de « à la place » du roi. Vous rajoutez le versa et vous obtenez le vice versa. « Versatil » ? Non, il ne versa pas dans le vice.

De plus, ce « il » a encore moins à y faire que le vice, il a donc moins à y faire que rien. Or, nous avions déjà souligné dans le passé que si rien est rien, moins que rien doit être quelque chose afin que son existence soit possible à côté de rien, faute de quoi le moins que rien serait identique à rien ce qui évidemment serait à ne plus rien y comprendre si l’on tient aux bases des mathématiques où le moins n’est pas égal à égal. Vous suivez ? La langue est un régal, faut l’avouer.

Notre versa accentue l’action de « remettre » ou « revenir ». Plus simplement démontré par le mot « renversable », mot familier avec la préparation du café avec une cafetière napolitaine ; une fois que l’eau est arrivée à ébullition, nous renversons la cafetière. Pas réussi ? Vous n’avez qu’à échouer dans le premier bar. Le café y sera espresso avec la petite crème rousse qui va avec, une vraie réussite qui fait échec à toutes vos tentatives précédentes quand, le matin, vous êtes pressé d’ingurgiter votre café avant de partir au travail. J’ai un doute sur votre caféinémie. Est-ce que vous vous êtes aperçu de l’incroyable juxtaposition des termes réussite et échec dans le paragraphe qui précède ? Non ? Il est dit que si la réussite du café n’est pas au rendez-vous vous n’avez qu’à échouer au bar voisin. La non-réussite invite donc à un échouement amenant au lieu d’échouage. Rien d’étonnant, me diriez vous. Seulement, voilà : au lieu d’échouage vous allez réussir à avoir votre café avec la susnommée crème rousse.

C’est donc en échouant que la réussite arrive à vos lèvres pour répandre l’arôme du café dans vos papilles gustatives et vos récepteurs olfactifs. Pour le respect de ces terminaisons sensorielles, il est interdit d’ingurgiter le café. Le café on le goûte. Et ce n’est pas fini avec la proximité entre échec et réussite. Dans ledit paragraphe, nous trouvons encore plus surprenant, à savoir que la réussite fait échec. Et non seulement, mais carrément que la réussite fait échec aux échecs précédents. Tout semble confirmer que l’échec est au coeur de la réussite. Si je suis conséquent avec moi-même, je dois donc poursuivre en vous parlant de la réussite. A sa lecture nous voyons déjà de petites étoiles briller dans le ciel, nous nous passons les ongles sur la poitrine pour nous féliciter, nous serrons fort la main de notre interlocuteur pour en faire de même, nous levons le pouce en signe de victoire.

Hélas, il y a toujours des rabat-joie qui arrivent à coller l’adjectif « mauvais » à notre brave réussite. Ce fut une mauvaise réussite, insistent-ils, arguant que le mot réussite n’est autre chose que le résultat d’une activité en nous serinant qu’il s’agit de « ce qui sort de nouveau », bon ou mauvais, avec un clin d’oeil à l’italien « riuscire » pour faire plus intello. J’avoue ne pas avoir d’arguments contraires, ce qui me met sur le qui-vive pour la suite de ce « Quiproquo ». Je dois donc reprendre mon intention de parler de la réussite vu que le titre est l’échec. Pourquoi ? Vous l’avez sans doute déjà pressenti. Je ne veux pas vous humilier en l’expliquant. L’évidence est un arbre qui ne nécessite pas d’être nourri contrairement au doute.

Eh bien cette phrase est une réussite à laquelle j’ai échoué par la réflexion intense et profonde de ces lignes que vous avez le privilège de lire. Vaniteux et altier ? Pas du tout, la modestie et l’humilité en personne. La preuve ? J’ai dû échouer pour réussir. On n’admet pas volontiers d’avoir échoué. Si la phrase est une réussite, le « Quiproquo » en est encore loin. Je dois réussir l’échec. Mamma mia ! Ne sachant pas comment continuer, je vais faire une pause relax. Un jeu va me distraire de ces antagonismes entre échec et réussite. Que choisir comme jeu ? Je suis trop fatigué pour faire un choix, je le laisse au hasard en saisissant le sac avec les lettres du Scrabble. Je plonge ma main, remue le tout comme pour le minestrone, la soupe aux légumes made in Italy, et je sors un jeton sur lequel je lis « s ». Et maintenant ? Dois-je me faire une liste des jeux commençant par « s » ?

Hors de question, trop épuisant. Je pourrais ajouter le « s » à un mot déjà niché entre mes synapses. Faut pas chercher bien loin, un mot récent fera l’affaire. Voyons... « réussite », admettons, ajoutons le « s » et... vais-je jouer aux jeux des réussites ? Existent-ils ? Même Internet n’a pas beaucoup de phantaisie, il propose le Solitaire auquel j’ai déjà échoué trois fois, non merci ! Je ne peux pas demander à l’IA, l’Ignorance Artificielle, car je ne l’ai pas encore installée sur mon ordinateur. Elle l’est déjà dans ma tête.


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Stefano Colombo Médecin psychiatre, psychologue diplômé consultant à la Faculté de Médecine de Genève (enseignement et supervision). Enseigne l’hypnose éricksonienne et la thérapie cognitive en France, Belgique, Suisse et Italie. Conférencier. colombo.s@bluewin.ch

Mohand Chérif Si Ahmed (alias Muhuc). Psychiatre en libéral à Rennes. Formation en hypnose et thérapies brèves. Pratique des thérapies à médiations artistiques. Utilise particulièrement le dessin humo ristique de situation en thérapie (pictodrame humoristique). Illustrateur et intervenant par le dessin d’humour

N°73 : Mai / Juin / Juillet 2024


Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce n°73 :
''En thérapie brève, comme en hypnose formelle, le thérapeute doit posséder de solides connaissances cliniques et la capacité à rentrer dans une transe partagée avec le sujet qu’il accompagne. A partir de cette expérience relationnelle, le thérapeute va poser des questions pour permettre au sujet de se décaler de l’histoire pathologique dans laquelle il est enfermé.''


Jérémie Roos nous montre comment l’utilisation du questionnement externalisant va permettre chez une jeune femme de 20 ans, prise dans une histoire de conflit de loyauté, de TOC et de surpoids, d’ouvrir un espace de liberté où elle pourra assumer ses prises de décision et trouver la force de renégocier sa place dans les relations. Je vous propose ensuite un texte où je développe un certain nombre de chemins pour « reprendre confiance dans le lien humain », quand celui-ci a été détruit par des vécus traumatiques. Il n’y a qu’à partir d’une expérience de sécurité, en lien avec une confiance retrouvée, que le sujet est en capacité de faire face aux effets du trauma.


Bernard Mayer souligne l’importance du travail avec le corps dans la désensibilisation des traumas. A travers le cas d’Eglantine, il nous fait percevoir l’importance du travail avec le Système nerveux autonome pour remettre en mouvement les processus de réassociation.

Dans l’« Espace Douleur Douceur », Gérard Ostermann nous présente le travail de trois praticiens :
- Dans le cas d’une douleur d’épaule, Michel Dumas nous indique comment l’hypnose favorise la réconciliation avec cette partie du corps isolée par la douleur.
- Christophe Hardy nous ouvre à l’utilisation hypnotique du « swiss ball » pour redonner du mouvement à un dos enfermé dans la lombalgie.

- Laurence Dalem nous rappelle l’importance des soins palliatifs et combien la relation n’appartient jamais à une personne, mais est toujours partagée.

- Dans le dossier thématique ''Interroger nos pratiques'', Guillaume Delannoy et Nathalie Koralnik nous font comprendre qu’aucun thérapeute n’est à l’abri de faire une « mauvaise séance » et ils développent ainsi un mode d’emploi en 20 points pour s’empêcher de réussir !

Vous pouvez en profiter pour lire le « Quiproquo » de Stefano Colombo sur l’échec, illustré avec humour par Muhuc, afin de comprendre pourquoi l’hypnose, on ne peut pas la réussir, avec un grand avantage : pas de réussite, pas d’échec !

J’ai eu le grand plaisir d’interviewer Dominique Megglé à la suite de la publication de son livre ''Les chaussettes trouées'', synthèse des points importants émergeant de sa longue expérience de clinicien. Il évoque l’importance de penser la psychopathologie à partir de l’hypnopathologie. Voilà une position novatrice qui ouvre de nouvelles perspectives pour nous interroger sur la pertinence de nos pratiques.

Stéphane Radoykov questionne également sa pratique, tout en acceptant ses limites, il recherche des améliorations en sortant par exemple du piège des automatismes. Il fait référence aux questionnaires de Scott D. Miller, essentiels pour se situer dans une dimension de co-construction pour ouvrir des possibles.

Adrian Chaboche nous rappelle la phrase d’Erickson pour nous inciter à être créatifs : « N’imitez pas. Soyez naturellement vous-même. J’ai passé du temps à essayer d’imiter d’autres, ce fut un désastre ! »

Sophie Cohen utilise « l’arbre de vie » pour aider Hélène à se libérer des relations dysfonctionnelles transgénérationnelles et s’autoriser à construire sa propre histoire en lien avec ses valeurs préférées.




Rédigé le 29/11/2024 à 00:01 | Lu 94 fois | 0 commentaire(s) modifié le 29/11/2024

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